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les premières années

l’appel de M. Thiers, le pays lui envoya, pour fonder la République, des hommes de gauche dont la venue hâta sa chute, et que, d’autre part, en lui donnant un successeur moins attaché à la forme républicaine, les monarchistes contribuèrent à l’affermissement du régime dont ils voulaient empêcher l’établissement définitif.

Un léger dissentiment entre M. Jules Simon, ministre de l’instruction publique, et ses collègues, provoqua, à la veille de la rentrée de Pâques, un remaniement ministériel. MM. Casimir-Périer et Bérenger entrèrent au conseil. La droite en conçut des inquiétudes, et le conflit s’engagea sous la forme déjà usuelle de l’interpellation. Le duc de Broglie conduisit l’assaut. M. Thiers exposa une dernière fois sa politique et fit voir la nécessité de la République découlant de l’impossibilité de la monarchie. Il ne rallia personne, même parmi les hésitants, mais il eut du moins la bonne fortune de pouvoir se retirer sur une parole précise et franche dont l’avenir devait souligner la parfaite sagacité.

L’Assemblée repoussa l’ordre du jour pur et simple[1], demandé modestement par les ministres, et mit une certaine insistance à réclamer sous une forme indirecte, mais pressante, cette démission qu’elle refusait d’agréer quel-

  1. « L’Assemblée, disait l’ordre du jour motivé, saisie des projets constitutionnels présentés en vertu d’une de ses décisions… considère qu’il importe, pour rassurer le pays de faire prévaloir dans le gouvernement une politique résolument conservatrice et regrette que les récentes modifications ministérielles n’aient pas donné aux intérêts conservateurs la satisfaction qu’ils avaient le droit d’attendre. » — L’ordre du jour pur et simple ayant été repoussé à seize voix de majorité, l’Assemblée déclara qu’elle siégerait dans la soirée et s’ajourna « pour attendre les communications du gouvernement ».