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les premières années

L’émotion et le retentissement provoqués par ce message furent considérables ; M. de Kerdrel se fit l’interprète des sentiments qui agitaient l’Assemblée, en demandant la nomination d’une commission destinée à élaborer une réponse au manifeste présidentiel. En attendant, on vota, après d’orageuses discussions, un ordre du jour qui blâmait les doctrines exposées à Grenoble par Gambetta et exprimait, d’autre part, la traditionnelle confiance dans le gouvernement[1]. Bientôt la commission fit connaître ses conclusions. M. Thiers avait déclaré : « La République sera conservatrice, ou elle ne sera pas », et il avait en même temps réclamé la prompte organisation des pouvoirs publics. La commission concluait à la préparation d’une loi « sur la responsabilité ministérielle » et, en manière de contrepoids, à l’adoption de mesures « contre le radicalisme ». Il n’était pas nécessaire d’être très perspicace pour deviner que cette seconde conclusion était la seule à laquelle on attachait quelque importance. Il faut créer « un gouvernement de combat » ; tout le rapport de M. Batbie est dans ce mot. Le ministère ne pouvait accepter une semblable mise en demeure ; il eut gain de cause, mais sa majorité ne fut que de 37 voix[2].

Ce débat a une importance sur laquelle on s’est mépris et que ne présentèrent par la suite ni le fameux amendement Wallon, ni le vote des lois constitutionnelles. C’est en réalité ce jour-là que la République libérale et parlementaire reçut de l’Assemblée sa véritable consécration ; l’appui de l’illustre citoyen en qui le pays avait placé sa

  1. Il y eut à droite et à gauche 300 abstentions.
  2. 335 voix de droite lui donnèrent tort.