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la question sociale.

« Un parti qui, d’un bout à l’autre de l’Europe, donne le spectacle d’une pareille unité, est un parti à qui demain appartient ; … aucune des grandes transformations sociales, aucune des véritables révolutions qui ont changé dans le passé la face du monde, n’a jamais été précédée de la manifestation générale d’un pareil état commun des esprits[1]. »

Cette recherche de l’entente internationale n’a plus rien de secret ni de ténébreux ; est-ce pour cela qu’on y prête une moindre attention ? La légende a singulièrement amplifié le péril tant qu’il ne s’est agi que d’une poignée d’agitateurs formés en société secrète. Maintenant que les revendications sociales sont formulées en plein jour par une masse considérable de citoyens, la sécurité semble rendue à leurs adversaires. La manifestation annuelle dite du 1er mai, dont l’importance provient en grande partie du caractère pacifique qu’elle a revêtu jusqu’ici, est la résultante des efforts vers l’unité du but et la similitude des moyens. C’est en même temps une revue générale des forces socialistes. On a quelque peine à la prendre au sérieux. Pourtant, ceux qui ont vu, à Londres, dans Hyde-Park, le 7 mai 1893[2], John Burns haranguer, du haut d’une charrette transformée en tribune, les 100,000 hommes disciplinés massés autour de lui, ont pu se convaincre que le « platonisme » de la manifestation était tout apparent.

Des moyens violents le plus doux est la grève, lors-

  1. Le Matin, 14 septembre 1894.
  2. Les Anglais, gens pratiques, reportent la manifestation au premier dimanche de mai, afin d’éviter un chômage inutile.