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l’éducation.

Patrie. Arnold se retira surpris, admirant la simplicité antique de cet enseignement. Qui peut prétendre que la disparition du mot Dieu ait, ici, correspondu à une pensée impie ? Mais quand il s’agit d’expliquer aux enfants les devoirs « envers la famille, envers les serviteurs, envers nos semblables », ou bien « les éléments de la morale sociale, les idées de justice, de charité, de fraternité[1] », le maître se trouve embarrassé. Aussi a-t-on rétabli discrètement dans les programmes détaillés des sections les mots : « devoirs envers Dieu[2] ». La permission ainsi donnée, le maître a peur d’en user : son enseignement ne serait facilité que s’il pouvait prendre Dieu pour centre de ses raisonnements. Or, en admettant que ses convictions personnelles ne l’en détournent pas, ce qui n’est pas toujours le cas, son intérêt le lui interdit : il craint de se compromettre et se borne à lire deux ou trois phrases d’un manuel quelconque : elles tombent, froides, compassées, mortes pour ainsi dire, dans l’esprit de l’enfant et y demeurent stériles. On peut dire qu’en ce moment en France, l’enseignement moral, dans les écoles publiques, existe à peine ; on en trouve une preuve indirecte, mais valable, dans les statistiques criminelles. En inaugurant par un remarquable discours un récent congrès international de sociologie, sir John Lubbock, chancelier de l’Université de Londres et membre de la Chambre des communes, rappela les grands efforts éducatifs accomplis par l’Angleterre depuis 1870 et leur attribua très légiti-

  1. Programme des cours moyen (9 à 11 ans) et supérieur (11 à 13 ans).
  2. Id.