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la république et l’église.

de l’assurer ; les évêques et les prêtres se considérèrent comme des dignitaires indépendants traitant avec l’État de puissance à puissance. De là cette ingérence du clergé dans la politique, que nos divers gouvernements ont tour à tour favorisée ou combattue selon leur origine ou leurs tendances. D’aucun côté on ne réclamait la neutralité ; il demeurait entendu que l’Église de France était gouvernementale ou opposante ; on ne s’avisait pas qu’elle pût rester neutre. « Sous le gouvernement sceptique et indifférent de Louis-Philippe, écrivait en 1863 M. de Montalembert, on vit le clergé regagner une partie de la légitime influence que les faveurs de la Restauration lui avaient fait perdre » ; et le grand écrivain ajoutait ces mots prophétiques : « S’il éclatait aujourd’hui une nouvelle révolution, on frémit à la pensée de la rançon qu’aurait à payer le clergé pour la solidarité illusoire qui a semblé régner pendant quelques années entre l’Église et l’Empire. » En effet, après avoir salué avec enthousiasme la révolution de 1848, avoir béni les arbres de la liberté et chanté de bon cœur le Domine salvam fac rempublicam, les prêtres français s’étaient ralliés à l’Empire et l’avaient vu s’écrouler avec regret ; aussi prirent-ils une part active aux luttes des premières années de la République et, tant que la forme du gouvernement demeura en question, s’efforcèrent-ils d’aider à la restauration monarchique[1]. Le 16 mai

  1. Voir la brochure de M. Pichon, député de la Seine, sur la Diplomatie de l’église et la troisième République. L’auteur y étudie le rôle de trois prélats d’origine, de tempérament, de relations et d’opinions entièrement divers, Mgr Dupanloup et les cardinaux Pie et de Bonnechose ; il les montre unis dans une même opposition à la forme républicaine au profit de trois solutions monarchistes différentes.