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la crise (1885-1889).

ministère (19 novembre 1887). Mais M. Grévy ne voulait pas comprendre : il s’occupa de constituer un nouveau cabinet. Cependant l’agitation populaire augmentait ; une houle se formait comme celle qui, en pleine mer, précède certaines tempêtes. La situation présentait de l’analogie avec celle du 23 février 1848 : fort heureusement, la Chambre fit preuve de sang-froid et de retenue, et repoussa les atteintes aux libertés parlementaires qui lui étaient proposées.

M. Grévy disputait son pouvoir pied à pied. Ses tergiversations aggravaient le péril. En même temps les partis s’occupaient de sa succession virtuellement ouverte. Les premiers pointages donnèrent à penser que Jules Ferry serait élu, et dès lors les « leaders » radicaux perdirent toute mesure ; ils voulurent organiser une émeute et s’abouchèrent avec M. Déroulède. Peu patriotiquement, certains parlaient même de revenir à M. Grévy et de le retenir au pouvoir plutôt que d’y laisser parvenir Jules Ferry. Ce mouvement n’échappa pas au Président, qui parut disposé à en profiter et, malgré des promesses réilérées, ajourna encore l’envoi de sa lettre de démission, À cette nouvelle l’émotion fut intense ; les sénateurs et les députés, avec beaucoup de dignité, se contentèrent néanmoins de suspendre leurs séances « en attendant la communication annoncée ».

Le message vint enfin ; il dissimulait mal le dépit et le ressentiment et contenait quelques phrases déplacées sous la plume d’un Président politiquement irresponsable. On ne s’attarda pas d’ailleurs à en peser les termes. L’attention se concentrait sur l’élection du nouveau Président : les