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la crise (1885-1889).

pressante et plus difficile à résoudre, tout cela assombrissait l’horizon politique. Pour la France, 1886 n’allait apporter ni améliorations ni changements. « L’année 1886, dit M. André Daniel[1], a été, à l’intérieur, une année d’équivoques, fertile en incidents oiseux, stérile en résultats pratiques ; à l’extérieur, une année d’appréhensions et d’inconséquences. Le cabinet Freycinet a passé onze mois à chercher son équilibre : il a usé son temps, ses forces et son crédit à tenter de détacher de l’extrême gauche une cinquantaine de voix et n’y a pas réussi ; il est impossible de discerner quelle pensée maîtresse a inspiré sa politique au dehors. »

Le cabinet Freycinet, qui prit le pouvoir le 7 janvier 1886[2], héritait d’une situation qui eût découragé les plus braves ; la Chambre, sur laquelle continuaient de peser, à gauche la néfaste et occulte influence de M. Clemenceau, à droite les intrigues inavouées des ambitions inconstitutionnelles, présentait le terrain le moins solide sur lequel pût s’aventurer un gouvernement ; il fallait l’incomparable souplesse de M. de Freycinet pour glisser entre les récifs, embrouiller les contradicteurs, faire dévier les coups et obtenir le vote d’ordres du jour à deux faces où l’équivoque masquait le manque de confiance. Le conflit serbo-bulgare était un sujet d’inquiétudes ; la crise économique, dont le

  1. André Daniel, L’Année politique, 1886.
  2. Il comprenait MM. Baïhaut, Demôle, Sarrien, Develle, Granet, Lockroy, le général Boulanger, l’amiral Aube. MM. Goblet et Sadi-Carnot avaient conservé l’instruction publique et les finances, et M. de Freycinet avait pris, avec la présidence du conseil, les affaires étrangères, auxquelles il avait adjoint les pays de protectorat. — Le 28 décembre 1885, M. Jules Grévy avait été réélu, par 457 voix sur 589 votants, Président de la République française pour sept ans.