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la crise (1885-1889).

législatives. M. Brisson appartenait à la nuance avancée de l’opinion républicaine ; mais s’il avait blâmé la politique de son prédécesseur, il ne songea pas à éluder — au détriment de l’honneur et des intérêts de la France — les responsabilités qui en résultaient pour lui. On ne pouvait faire aux radicaux que des concessions de détail ; le Panthéon fut désaffecté à l’occasion des funérailles de Victor Hugo, et dans son indulgence pour les manifestants du 24 mai qui avaient arboré sur la voie publique des insignes séditieux, M. Allain-Targé établit une distinction restée fameuse entre les drapeaux et les bannières. Mais lorsqu’il fallut faire sanctionner par les Chambres les traités de protectorat signés en 1884 à Hué et à Pnom-Penh, lorsque furent portées à la tribune une proposition d’amnistie en faveur des condamnés politiques et une demande de mise en accusation de Jules Ferry et de ses collègues, le cabinet Brisson retrouva devant lui la droite unie à l’extrème gauche et se vit soutenu par le gros des forces ferrystes. Elles l’appuyaient à contre-cœur, il est vrai, et avec une sorte de répugnance dédaigneuse, n’acceptant de lui aucune direction et stimulées plutôt par les attaques de l’opposition que par l’autorité du gouvernement. Cette majorité, d’ailleurs, ne se reformait que pour se désagréger de nouveau à tout moment ; l’initiative parlementaire en prenait occasion pour se donner libre carrière ; jamais on ne vit pareille abondance de projets de loi ; la plupart, d’une opportunité douteuse, tendaient, par leur originalité, à fixer dans l’opinion le nom — jusque-là obscur — du député à l’initiative duquel ils étaient dus.

Les élections allaient se faire au scrutin de liste ; à me-