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l’alerte de 1875

qu’il sut adopter une ligne de conduite également éloignée de la présomption, laquelle eût écarté de nous les sympathies des autres nations, et de la pusillanimité qui eût compromis l’honneur de la France.

Au mois de juin de cette même année 1875, féconde en incidents et en malentendus, une insurrection éclata en Herzégovine et gagna rapidement la Bosnie, la Serbie et le Montenegro. L’Autriche, plus directement intéressée, intervint la première[1], mais sans parvenir à triompher de l’inertie ottomane, de sorte qu’au printemps de 1876 la situation, qui avait été s’empirant chaque jour, était devenue très grave ; une effervescence générale se manifestait en Orient ; les consuls de France et d’Allemagne furent assassinés à Salonique ; les Serbes, réduits sur tous les points, en appelèrent à l’Europe, et un mouvement insurrectionnel ayant éclaté en Bulgarie, 15 à 20,000 chrétiens furent massacrés ; cette répression inique déchaîna les colères de l’opinion, sans toutefois mettre d’accord les gouvernements. L’Angleterre refusait son adhésion au mémorandum de Berlin, qu’avaient rédigé les trois chanceliers et que la France et l’Italie avaient accepté aussitôt. À Constantinople, la comédie se mêlait au drame. Selon une pittoresque expression, on avait « suicidé » le sultan Abd-ul-Azis ; son successeur, Mourad v, jouait au monarque constitutionnel ; pour donner la preuve de ses bonnes intentions réformatrices, la Porte proclama une constitution

  1. Elle publia le 30 décembre la « note Andrassy » qui réclamait des satisfactions modérées, mais sur un ton assez impérieux ; il s’agissait de la liberté religieuse et de l’amélioration du sort des chrétiens. Le gouvernement turc reçut la note d’un air pénétré et la mit dans ses cartons.