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par les Romains eux-mêmes ; Cicéron en fit une fois l’aveu. Ainsi il fut au pouvoir des « tribuns » d’opposer leur veto à une délibération des comices ou même à une décision des consuls — comme il était au pouvoir des « pontifes » de dissoudre brusquement une assemblée ou de casser ses décisions sous prétexte d’augures défavorables — comme il était au pouvoir des « censeurs » de restreindre pour indignité les droits politiques d’un citoyen pendant cinq ans : tout cela sans appel possible, souverainement. Les charges étaient brèves et jamais uniques. Il y eut deux consuls pour assurer le pouvoir exécutif et nommés pour un an seulement. Partout la méfiance se révélait à l’égard de ceux auxquels on confiait une charge. Et pourtant à ceux-là, on octroyait dans les limites resserrées et complexes à la fois de leurs spécialités, des pouvoirs dictatoriaux par bribes. La dictature elle-même, véritable, complète, demeurait en marge ; douze ans ne s’étaient pas écoulés depuis la révolution de 509 qu’on se trouvait amené à la rétablir temporairement. Dès l’an 498, il y fallut recourir en la limitant à six mois. Depuis lors, l’expédient fut souvent employé et les dictatures temporaires, en cas de péril public se succédèrent, centralisant tous les pouvoirs aux mains du titulaire.

Le reste du temps, c’est le sénat qui gouvernait. Simple corps consultatif jusqu’en 509, il comptait à cette date trois cents membres. Ce chiffre fut porté par la suite à quatre cents. Le sénat eut pour mission d’établir le budget, de conclure les traités, de diriger l’administration et, plus tard, de régler le sort des pays conquis. En fait, sa compétence s’étendit bien au delà. C’est qu’au milieu de la complication des charges annuelles, il représentait la permanence et par là, la majesté de la puissance romaine. La liste des sénateurs était dressée tous les cinq ans par les censeurs mais ceux-ci se bornaient à combler les vides faits par la mort ou à remplacer les indignes en cas de scandale. Ils invitaient à siéger dans l’auguste assemblée les citoyens qui s’étaient formés aux affaires en remplissant de façon satisfaisante les principales fonctions publiques. À Rome, le même homme pouvait être appelé successivement à l’exercice d’un commandement militaire, au maniement des deniers de l’État, à l’administration d’une province, aux fonctions de juge ainsi acquérait-il en certains cas la plus haute expérience et pouvait-il exercer sur l’opinion une autorité considérable.

Composé en majeure partie de tels hommes, le sénat qui avait commencé par se montrer mesquin et souvent peu compréhensif,