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les voies de l’amour

qu’elle veut. Je ne repasse plus seule ici parce que je crains d’y voir le tombeau de mes souvenirs. »

« Tous les jours, pendant ma promenade chez elle, la pauvre petite semblait renaître à la vie ; ses joues, au soleil printanier, semblaient emprunter un peu de couleur ; sa voix se faisait moins triste ; ses yeux reprenaient un peu d’éclat ; son affaissement moral se dissipait. Sa sympathie pour moi semblait augmenter tous les jours. Cependant quand je faisais allusion à l’abandon de son ami, elle redevenait triste et muette. Alors je lui conseillais avec beaucoup de circonspection d’être plus indépendante et plus fière, et d’oublier celui qui l’oubliait ; la raison le lui ordonnait. Elle n’avait pas le droit de gâcher une vie aussi belle que la sienne et de laisser faner une fleur qui promettait tant de beauté, d’éclat et de parfum. Elle devait penser au chagrin que son obstination et le mauvais état de sa santé causaient à ses parents. Le hasard, lui disais-je, avait peut-être placé près d’elle un autre cœur qui saurait comprendre le sien et l’aimer comme elle devait être aimée, avec toute la fougue de la passion, pour sa beauté et la perfection de ses qualités. Mais elle ne semblait pas me comprendre tant sa tristesse la rendait sourde aux plus douces consolations. Un jour cependant, quel rêve joyeux avait-elle fait pendant la nuit ? elle me rejoignit sous le gros érable qui inclinait au-dessus du fleuve ses branches toutes ver-