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Dans un conte turc de Constantinople, sur lequel nous aurons à revenir plus loin[1], l’oiseau, causant avec le jardinier du roi, souhaite aussi, après une malédiction contre la fausse reine, que l’arbre sur lequel il est perché, se dessèche.

Cette ressemblance, sur un détail très caractérisé, entre le conte grec et le conte turc, n’a rien d’étonnant, quand on ne veut pas fermer les yeux à tous les indices qui nous montrent les contes de l’Inde arrivant chez les Grecs modernes par le courant persano-arabo-turc [2].


Le conte grec publié par Buchon appartient, pour le plan général, au thème dit de Sneewittchen (Grimm, n° 53), modifié en ce sens que ce sont les sœurs de l’héroïne et non sa marâtre ou sa mère, qui sont jalouses de sa beauté ; un autre conte grec, provenant aussi de l’île de Chio, appartient au même thème, sans cette modification. La prétendue sage-femme qui se présente au palais, est la marâtre de l’héroïne. Mais ce qui est absurde, c’est que cette sorcière enfonce dans la tête de l’accouchée, non une épingle magique, mais « une fourchette qui se trouve sous sa main »[3].


Deux contes, dont la première partie est du type de Cendrillon, ont une seconde partie où figurent et l’épingle enchantée et l’oiseau. L’un de ces deux contes est encore un conte grec, ce conte de la province de Thessalie que nous avons eu l’occasion de rapprocher d’un conte de l’Indo-Chine[4]. Nous y relèverons ce détail réaliste : les deux méchantes sœurs s’introduisent, déguisées en « diaconesses », auprès de la jeune reine, récemment accouchée, et s’offrent à … l’épouiller. — Dans l’autre conte, un conte arabe d’Égypte[5], c’est le jour du mariage de Cendrillon que ses sœurs, sous prétexte de lui faire une belle coiffure, lui enfoncent dans la tête de grandes épingles en forme d’aigrette. Ici, par exception, il n’y a pas de fausse reine substituée à la vraie.

  1. I. Kunos, Türkische Volksmærchen aux Stambul (Leyde, 1905), n° 5, p. 25. — Comparer n° 26, p. 208.
  2. Voir, dans cette Revue (1912), les pp. 396-402 de notre travail Les Mongols et leur prétendu rôle dans la transmission des contes indiens vers l'Occident européen (pp. 42-48 du tiré à part).
  3. H. Carnoy et J. Nicolaïdès, Traditions populaires de l’Asie Mineure (Paris, 1889), p. 91 et suiv.
  4. Voir la note à la fin de notre Excursus 1. La Pantoufle de Cendrillon dans l’Inde.
  5. Artin-Pacha. Contes populaires de la Vallée du Nil (Paris, 1895, p. 66).>.