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NOTICE PRÉLIMINAIRE



Le manuscrit des Nouvelles littéraires de l’abbé Raynal comporte plus de 500 pages, foliotées au recto seulement, reliées en deux volumes dont l’un est entièrement rempli par les Nouvelles et dont l’autre renferme les années 1754 et 1755 de la Correspondance de Grimm. Il se compose de feuilles de papier doubles in-quarto, numérotées avec soin, mais datées seulement à partir du 18 mai 1750, remplies jusqu’aux marges d’une écriture le plus souvent fine et serrée ; leur orthographe est parfois capricieuse, surtout en ce qui concerne les noms propres. — Plusieurs de ces feuilles portent en tête la signature du baron de Studnitz, qui représentait sans titre officiel le duc de Saxe-Gotha en France, et qui les lisait sans doute avant de les adresser à son souverain. Sans doute aussi les expédiait-il sous enveloppe comme une lettre ordinaire, car un certain nombre d’entre elles gardent encore très-distinctement la trace du pliage en quatre. Le premier volume contient en outre la lettre que voici, datée mais non signée, écrite à coup sûr par Raynal à la duchesse Dorothée ; elle nous fournit la date précise du début de ce journal manuscrit, et la redondance toute méridionale de son style trahit bien le caractère de celui qui l’écrivit :


À Paris, ce 29 juillet 1747.

Madame,

La saison où nous nous trouvons est peu favorable aux lettres. Nous autres Français, nous employons l’été à remporter des victoires, et l’hiver à les célébrer. Lorsque les frimas du retour inspireront à l’Anglais rêveur l’envie de se défaire, le Gaulois gai et un peu fou chantera ses amours, ses exploits, et, s’il le faut, ses malheurs. Cependant n’allez pas croire, madame, qu’une léthargie d’esprit ait engourdi toute la nation ; les lettres respirent encore parmi nous, voici leur histoire :