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du roi Stanislas ; cinq des dix volumes in-12 que doit avoir cette histoire seront publiés avant Pâques.

— Un de nos amis me dit l’autre jour l’épitaphe qu’il avait faite d’un auteur qu’il ne me voulut pas nommer ; je vais la transcrire ici parce qu’elle m’a paru plaisante :

Il étaSous ce tombeau gît un auteur
Il étaDont en deux mots voici l’histoire :
Il était ignorant comme un prédicateur
Il étaEt malin comme un auditoire.


XLII

Il y a quelques années qu’on fit courir en manuscrit un portrait de Voltaire fort ressemblant et extrêmement ingénieux. Comme il vient d’être imprimé dans une mauvaise critique de Sémiramis, qui apparemment ne parviendra jamais jusqu’à vous, j’ai cru bien faire en vous l’envoyant. Quelques curieux m’ont assuré que ce portrait était l’ouvrage du jeune marquis de Charost, qui fut tué pendant la guerre de 1735, et dont nous avons quelques morceaux d’une grande délicatesse que vous trouverez dans un recueil publié par Saint-Hyacinthe[1].


portrait de voltaire.

« M.  de Voltaire est au-dessous de la taille des grands hommes, c’est-à-dire un peu au-dessous de la médiocre ; je parle à un naturaliste ; ainsi point de chicane sur l’observation ; il est maigre, d’un tempérament sec ; il a la bile brûlée, le visage décharné, l’air spirituel et caustique, les yeux étincelants et malins. Tout le feu que vous trouvez dans ses ouvrages, il l’a dans son action ; vif jusqu’à l’étourderie, c’est une ardeur qui va et vient, qui vous éblouit et qui pétille. Un homme ainsi constitué ne peut pas manquer d’être valétudinaire : la lame

  1. Voltaire, qui avait eu connaissance de ce portrait, était tenté de l’attribuer à l’abbé de La Marre. Voir sur ce personnage les Œuvres complètes de Diderot, édition Garnier frères, tome XIX, p. 43.