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CHAPITRE IV.

ordres une embarcation faible qui, la veille, avait eu un bordage enfoncé par une des pièces transversales du radeau ( accident auquel on avait remédié en appliquant sur l’ouverture une large plaque de plomb), et d’ailleurs très-chargée, pour éviter ce choc qui aurait pu lui être funeste, fut obligé de larguer la remorque qui le tenait au canot major, et divisa ainsi en deux la ligne que formaient les embarcations au-devant du radeau, en s’en séparant avec le canot du commandant qui était en tête. Lorsque le commandant et M. Maudet se furent dégagés, ils serrèrent le vent et revirèrent ensuite de bord pour venir prendre leur poste ; M. Maudet héla même à M. de Chaumareys : Capitaine reprenez votre touline. Il reçut pour réponse : Oui, mon ami. Deux canots étaient encore à leur poste ; mais avant que les deux autres eussent pu les rejoindre, le canot major venait de se séparer. L’officier qui le commandait s’exprime ainsi sur cet abandon : « La touline n’a point été larguée de mon embarcation, mais bien du grand canot qui était derrière moi. » Ce second abandon nous en présageait un plus cruel ; car l’officier qui commandait dans le grand canot, après nous avoir remorqués seul un instant, fit larguer l’amarrage qui le tenait au radeau. Lorsque les remorques furent larguées, nous étions à deux lieues de la frégate ; la brise venait du large, la mer était aussi belle qu’on pouvait le désirer. Cette dernière remorque ne cassa point, comme le gouverneur s’est efforcé de le faire croire