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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

l’eau de mer irrita tellement les douleurs de sa jambe, qu’il manqua de se trouver mal. Nous fîmes part de son état au canot le plus voisin de nous ; on répondit qu’une embarcation allait venir prendre cet officier. Nous ne savons si l’ordre en fut donné ; mais il est certain que M. Coudin fut obligé de rester sur le fatal radeau.

La chaloupe que nous avons été forcés d’abandonner un moment pour entrer dans ces détails nécessaires, rallia enfin : ce fut elle qui, nous l’avons déjà dit, déborda la dernière de la frégate. Le lieutenant de vaisseau qui la commandait, craignant avec raison de ne pouvoir tenir la mer dans une embarcation délabrée, démunie d’avirons, fort mal voilée et faisant beaucoup d’eau, longea le premier canot en le priant de lui prendre quelques hommes ; on refusa. Cette chaloupe devait nous laisser des cordages pour installer notre mâture, ce qui, un instant auparavant nous avait été hêlé du premier canot que nous avions au-devant de nous. Nous ignorons quelles furent les raisons qui l’empêchèrent de nous laisser des manœuvres ; mais elle passa outre, et courut sur la seconde embarcation, qui également ne voulut recevoir personne. Alors l’officier qui la commandait, voyant qu’on se refusait à lui prendre du monde, et tombant toujours sous le vent, parce que ses voiles orientaient fort mal et que les courans le drossaient, aborda le troisième canot commandé par l’enseigne de vaisseau nommé Maudet, dont nous avons déjà parlé plus haut. Celui-ci, ayant sous ses