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SUR LA HOUILLÈRE DE BEAUJONC.

Personne n’était encore remonté ; l’eau était peu considérable, Goffin pouvait échapper au danger ; il avait même une jambe dans le panier, son fils est auprès de lui, lorsqu’il s’écrie : « Si je monte mes ouvriers périront ; je veux sortir d’ici le dernier, les sauver tous, ou périr avec eux ! » Il dit, s’élance, met à sa place Nicolas Riga, aveugle. Le panier s’élève rapidement, mais suspendu seulement à deux des quatre chaînes qui le soutiennent, il est dur le côté ; quelques ouvriers ne pouvant se tenir dans cette position, tombent dans l’eau et en sont retirés par Goffin et son fils qui ne le quitte pas.

Le panier redescent, il arrive pour la seconde fois ; les ouvriers se pressent, s’entassent ; mais la chûte du coup d’eau en précipite une partie : le brave Goffin, son fils et Jean Bernard sont encore là pour sauver ceux que l’eau même, déjà assez élevée, avait garantis.

Le panier revient pour la troisième fois, les chevaux du manège sont lancés, leur course est rapide ; les ouvriers n’ont qu’un instant pour saisir la machine qui doit les enlever ; Goffin voit le danger, les imprudens ne l’écoutent plus, ils s’accrochent, remontent ; la plupart retombent et périssent dans le bure, plus profond de deux mètres que le lieu du chargement où l’eau était déjà parvenue à la hauteur de la poitrine.

Il n’y avait donc plus un moment à perdre, le salut par le bure devenait impraticable, l’eau allait atteindre le toit des galeries. Goffin conserve le jugement. Le dévouement de ce père de sept enfans en bas