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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

évalue à cinq mille âmes le nombre de ses habitans, ce qui est hors de toute proportion avec son peu de surface, qui n’offre qu’environ neuf cent dix mètres de longueur sur une largeur de deux cent quarante-cinq. Son pourtour n’est pas de plus de deux mille mètres. Ce n’est qu’un rocher fort élevé dont les côtes sont d’un abord extrêmement difficile. Les roches nombreuses qui l’entourent de toutes parts lui ont fait donner par quelques voyageurs le nom de Petit Gibraltar ; et si l’art secondait la nature, il n’y a nul doute que, comme ce dernier, ce rocher serait imprenable. Cependant l’amiral d’Estrées s’en empara pour la première fois vers la fin de 1677. Cette île gît sud-sud-est et nord-nord-ouest, et n’est éloignée du cap Vert que de deux mille cinq cents mètres environ. Elle est défendue par un fort et quelques petites batteries en très-mauvais état ; mais elle n’en est pas moins presque inexpugnable par sa position. Elle n’est réellement accessible que dans la partie de est-nord-est, où se trouve une anse assez large et profonde, susceptible de recevoir les plus gros navires. Sa rade est immense ; les vaisseaux y sont en sûreté et assez bien abrités. À deux lieues de Gorée se voit la baie de Ben, qui présente les plus grandes facilités pour le carénage des vaisseaux et toutes les réparations dont ils pourraient avoir besoin.

L’air de Gorée est frais pendant la soirée, la nuit et le matin ; mais dans le cours de la journée il règne dans l’île une chaleur insupportable produite par la