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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

M. Valentin de lui demander comment il était parvenu à le prendre et à le garotter de cette manière. Voici ce que répondit l’enfant en langue yoloffe : « J’ai vu « sortir ce lézard d’une haie ; je l’ai aussitôt pris par la queue et près des pattes de derrière. Lui ayant ensuite fait abandonner la terre en le soulevant, je l’ai saisi par le cou avec la main gauche, et le tenant bien serré et éloigné de mon corps, je l’ai porté dans cette position jusqu’au village de Gandiolle, où j’ai trouvé un de mes camarades qui lui a attaché les pattes avec du chiendent, et m’a engagé à venir le présenter aux Toubabes qui sont sous cette tente. Mon camarade m’a dit aussi qu’ils étaient Français ; et comme nous les aimons beaucoup, j’ai voulu venir les voir et leur offrir ce lézard. » Après ces détails, M. Corréard présenta la crosse de son fusil à l’animal qui, avec ses dents, la sillonna profondément. Lui ayant présenté le bout du canon, il le saisit à l’instant avec fureur et se brisa toutes les dents contre le fer, ce qui lui fit répandre une grande quantité de sang : néanmoins il ne faisait aucun effort pour se débarrasser des liens qui le retenaient[1].

On trouve dans les environs de Gandiolle une herbe de deux mètres de hauteur, des champs de maïs et de

  1. Ce lézard était probablement un tupinambis. Cet animal, qui n’est pas rare au Cap-Vert, grimpe sur les arbres, fréquente les marais, et fait, dit-on, des blessures cruelles lorsqu’on le saisit sans de grandes précautions. Les habitans des Mamelles assurent qu’il dévore les