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CHAPITRE I.

200 mètres au-dessus du niveau de la mer. La population de Madère est de 85,000 à 90,000 habitans, à ce que nous a assuré un homme digne de foi qui, pendant quelque temps, a habité cette belle colonie[1].

Nous longions ainsi la côte de Madère, parce que l’intention du commandant était d’y envoyer un canot pour en rapporter des rafraîchissemens. L’indécision ordinaire du commandant de la frégate, jointe à un petit incident, le fit renoncer au projet de se présenter devant Funchal. Par une bizarrerie que rien ne justifiait, il paraissait avoir plus de confiance pour la conduite de son bâtiment, dans un passager qui, à la vérité, avait fréquenté ces parages, que dans ses officiers. En s’approchant de Madère, le bâtiment ne manœuvrait presque plus que sur les indications de ce passager. Tout-à-coup la brise, toujours forte au voisinage de ces hautes terres, cessa lorsqu’on s’en fut trop approché ; les voiles coiffèrent. Le courant paraissait rapide ; mais après quelque flottement dans la manœuvre, bientôt rétablie par les officiers, on parvint à reprendre l’air, et il fut décidé qu’on mettrait le cap sur Ténériffe.

La crainte de ne pouvoir ensuite refouler de forts courans, qui portent sur la terre, nous fit gagner le large, où les vents étaient favorables ; ils soufflaient avec assez de force. Il fut décidé que le canot n’irait

  1. C’est aussi l’opinion de Barrow, dans son voyage à la Cochinchine. Sir Georges Stauton ne lui donne que 80 mille habitans.