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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

la nature. Il y avait trente-cinq jours que nous étions arrivés à l’île Saint-Louis. M. Corréard eut la douleur de le voir mourir à ses côtés. Ce malheureux jeune homme lui dit, avant sa mort, qu’il mourait satisfait, puisqu’il avait eu le temps de recommander à son père un fils naturel qu’il chérissait. À cette époque les secours de M. Peddy n’avaient pas encore soulagé M. Corréard ; il était nu, de manière qu’il ne put assister aux funérailles de son infortuné camarade qui venait de succomber, exténué par les souffrances qu’il avait éprouvées sur le radeau.

Les restes de ce jeune officier reçurent les honneurs qui lui étaient dûs. MM. les officiers anglais, et particulièrement le major Peddy, dans cette circonstance, se comportèrent d’une manière digne d’éloges. Peut-être les lecteurs ne seront-ils pas fâchés de retrouver ici quelques détails de cette lugubre cérémonie. C’est M. Corréard qui les a tracés, et qui trouve encore un douloureux plaisir à se rappeler ces momens, qui durent lui faire, et lui firent en effet une si profonde impression.

Le corps du malheureux Clairet fut exposé dans une salle souterraine de l’hôpital, où se portait une foule immense, pour voir encore une fois la dépouille mortelle de celui qu’on regardait presque comme un homme extraordinaire, et qui devait en ce moment à nos cruelles aventures, l’intérêt puissant dont la faveur publique entourait ceux qui avaient si miraculeusement