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CHAPITRE I.
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était beau, les vents de la partie du nord-ouest, et par conséquent un peu trop près pour nous permettre de doubler Chassiron pendant un courant de flot qui était contraire. Le soir, vers les sept heures, au commencement de jusant, nous levâmes l’ancre ; on déploya les voiles ; tous les navires imitèrent notre manœuvre : l’appareillage leur avait été signalé quelques instans auparavant. À la nuit, nous nous trouvâmes entre les feux de Chassiron et de la Baleine[1]. Peu d’instans suffirent pour les doubler. À peine fumes-nous au large que les vents devinrent presque calmes ; les navires ne gouvernèrent plus, le temps se couvrit, la mer était très-houleuse ; tout, enfin, nous présageait quelque bourrasque. Les vents menaçaient de souffler de la partie de l’ouest, et par conséquent d’être contraires ; ils étaient variables et par rafales. Vers les dix heures on s’aperçut que la route que nous tenions portait directement sur un danger nommé les Roches-Bonnes[2] ; on vira de bord pour éviter une perte certaine. Entre onze heures et minuit un gros grain se forma dans le nord et amena des vents de cette partie : nous pûmes alors mettre le cap en route. Les nuages se dissipèrent, et le lendemain le temps fut fort beau ; la brise du nord-est,

  1. La tour de la Baleine est un phare placé de l’autre côté du pertuis d’Antioche, sur la côte de l’île de Ré.
  2. Les Roches-Bonnes sont à huit ou neuf lieues au large de l’île de Ré ; leur position n’est pas exactement déterminée sur les cartes marines.