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CHAPITRE IX.

gaison, et parvinrent à la pousser devant eux jusqu’au rivage. Aussitôt l’adjudant Petit fit une distribution de biscuit et d’eau-de-vie, et chargea le reste sur des chameaux. Ce fut alors qu’on apprit de l’Argus le malheureux sort des naufragés du radeau, et qu’on n’était plus qu’à une vingtaine de lieues du Sénégal.

Le 20, dès le matin, il fallut se débarrasser de M. Danglas ; car, dans son délire, il voulait absolument commander la caravane. On lui fit entendre qu’il était bien plus glorieux pour lui d’aller en ambassade auprès du gouverneur, annoncer l’arrivée prochaine de la compagnie. Il partit donc en avant avec le marabou Abdalla, qui devait prier les autorités anglaises d’envoyer des ânes et des chameaux pour les hommes les plus fatigués. Mais le 21, la faiblesse de M. Danglas retardant la marche d’Abdalla, ce dernier dépêcha un jeune Maure au gouverneur[1]. Les montures demandées au gouverneur furent mises en route. La caravane les rencontra à sept à huit lieues de Saint-Louis.

Le 22, à sept heures du soir, M. Danglas et le marabou Abdalla arrivèrent au petit village de Guétandar, situé en face de Saint-Louis, sur la pointe de Barbarie, qui sépare le fleuve de la mer : un lapto lui offrit sa pirogue pour traverser le fleuve. M. Danglas, en descendant sur la rive opposée s’écria, une voile, sauvée ! et il oublia entièrement ses compagnons

  1. Un Maure fait à pied trente lieues par jour, trottant sans cesse, et soutenant ses bras avec un bâton placé en travers sur ses épaules.