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CHAPITRE VIII.

à la côte, étaient arrivées au Sénégal après avoir essuyé les temps les plus orageux. Sans perdre un instant, M. le gouverneur avait expédié l’Argus, et pris toutes les mesures pour secourir les naufragés, et aller jusqu’à la Méduse[1]. De plus, on avait envoyé par terre des chameaux chargés de vivres, que nous devions rencontrer ; enfin les Maures étaient prévenus de nous respecter et de nous porter secours. Tant de bonnes nouvelles nous rendent à la vie et nous donnent un nouveau courage.

Quand les trois barils annoncés eurent été abandonnés à la mer, nous les suivions des yeux, nous craignions que les courans, au lieu de les amener à la côte, ne les envoyassent au large. Enfin nous ne doutons plus qu’ils ne s’approchent de nous ; nos Noirs et nos Maures les vont chercher en nageant, et les poussent vers le rivage, où nous nous en emparons.

Le gros baril fut défoncé ; le biscuit et le fromage furent distribués. Nous ne voulûmes pas défoncer ceux de vin et d’eau-de-vie ; nous appréhendions que les Maures, à une telle vue, ne pussent se contenir et ne se précipitassent sur cette proie. Nous marchâmes, et une demi-lieue plus loin sur le bord de la mer, nous fîmes un repas des dieux. Nos forces réparées, nous continuâmes notre route avec plus d’ardeur.

  1. M. Brédif se trompe, puisque le gouverneur, M. Chmaltz, est resté deux fois vingt-quatre heures sans faire partir l’Argus.