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CHAPITRE V.

lement le tendon au-dessus du talon. Les autres l’assommaient à grands coups de sabre et de crosse de carabine ; ses cris nous firent voler à son secours. Dans cette circonstance, le brave Lavillette, ex-sergent d’artillerie à pied de la vieille garde, se comporta avec un courage digne des plus grandes éloges ; il fondit sur les furieux, à l’exemple de M. Corréard, et bientôt ils eurent arraché l’ouvrier au danger qui le menaçait. Quelques instans après, une nouvelle charge des révoltés fit tomber en leurs mains le sous-lieutenant Lozach, qu’ils prenaient dans leur délire pour le lieutenant Danglas, dont nous avons parlé plus haut, et qui avait abandonné le radeau lorsque nous fûmes sur le point de quitter la frégate. La troupe en général en voulait beaucoup à cet officier, qui n’avait jamais servi, et à qui les soldats reprochaient de les avoir traités durement pendant qu’ils tenaient garnison à l’île de Ré. La circonstance eût été favorable pour apaiser sur lui leur fureur, et la soif de veangeance et de destruction qui les dévorait : s’imaginant le trouver dans la personne de M. Lozach, ils voulaient le précipiter dans les flots. Au reste, les militaires n’aimaient guère plus ce dernier, qui n’avait servi que dans les bandes vendéennes de Saint-Pol-de-Léon. Nous croyions cet officier perdu, quand sa voix, qui se fit entendre, nous apprit qu’il était encore possible de le secourir. Aussitôt MM. Clairet, Savigny, Lheureux, Lavillette, Coudein, Corréard, et quelques ouvriers s’étant formés en petit peloton, s’élancèrent