Je le sais ; mais, Seigneur, qui vous peut engager
Aux soins de le punir et de vous en venger ?
Quand son grand cœur charmé d’une belle princesse
En a su mériter l’estime et la tendresse,
Quel dieu, quel bon génie a dû lui révéler
Que le vôtre pour elle aimeroit à brûler ?
À quels traits ce rival a-t-il dû le connoître,
Respecter de si loin des feux encore à naître,
Voir pour vous d’autres fers que ceux où vous viviez,
Et lire en vos destins plus que vous n’en saviez ?
S’il a vu la conquête à ses vœux exposée,
S’il a trouvé du cœur la sympathie aisée,
S’être emparé d’un[1] bien où vous n’aspiriez pas,
Est-ce avoir fait des vols et des assassinats ?
Abondez en raisons pour cacher le mystère :
Je parle, promets, prie, et je n’avance rien.
Aussi votre intérêt est préférable au mien ;
Rien n’est plus juste ; mais…
Seigneur…
Je vous fais trop jouir des troubles de mon âme.
Le ciel se lassera de m’être rigoureux.
Seigneur, quand vous voudrez, il fera quatre heureux[2].
- ↑ L’édition de 1692 porte : « S’être emparé du bien. »
- ↑ La même situation et une pensée analogue se trouvaient déjà dans Tite et Bérénice. Domitian y dit à Bérénice (acte III, scène ii, vers 799 et 800) :
Les scrupules d’État, qu’il falloit mieux combattre,
Assez et trop longtemps nous ont gênés tous quatre.