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1330Il veut que je la serve et ne prétende rien,
Que j’appuie en l’aimant toute son injustice,
Que je fasse de Rome exiler Bérénice.
Mais, Seigneur, à mon tour puis-je vous demander
Ce qu’à vos plus doux vœux il vous plaît d’accorder ?

TITE.

1335J’aurai peine à bannir la Reine de ma vue.
Par quels ordres, grands Dieux, est-elle revenue ?
Je souffrois, mais enfin je vivois sans la voir ;
J’allois…

DOMITIAN.

J’allois…N’avez-vous pas un absolu pouvoir,
Seigneur ?

TITE.

Seigneur ?Oui ; mais j’en suis comptable à tout le monde :
1340Comme dépositaire, il faut que j’en réponde.
Un monarque a souvent des lois à s’imposer ;
Et qui veut pouvoir tout ne doit pas tout oser.

DOMITIAN.

Que refuserez-vous aux desirs de votre âme,
Si le sénat approuve une si belle flamme ?

TITE.

1345Qu’il parle du Vésuve, et ne se mêle pas
De jeter dans mon âme un nouvel embarras.
Est-ce à lui d’abuser de mon inquiétude
Jusqu’à mettre une borne à son incertitude ?
Et s’il ose en mon choix prendre quelque intérêt,
1350Me croit-il en état d’en croire son arrêt ?
S’il exile la Reine, y pourrai-je souscrire ?

DOMITIAN.

S’il parle en sa faveur, pourrez-vous l’en dédire ?
Ah ! que je vous plaindrois d’avoir si peu d’amour !

TITE.

J’en ai trop, et le mets peut-être trop au jour.