Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/604

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et que de votre cœur vos yeux indépendants
Triomphent comme moi des troubles du dedans.
Suivez, passez l’exemple, et portez à Camille
Un visage content, un visage tranquille,
Qui lui laisse accepter ce que vous offrirez,
360Et ne démente rien de ce que vous direz.

OTHON.

Hélas ! Madame, hélas ! que pourrai-je lui dire ?

PLAUTINE.

Il y va de ma vie, il y va de l’empire ;
Réglez-vous là-dessus. Le temps se perd, Seigneur.
Adieu : donnez la main, mais gardez-moi le cœur ;
365Ou si c’est trop pour moi, donnez et l’un et l’autre,
Emportez mon amour et retirez le vôtre ;
Mais dans ce triste état si je vous fais pitié,
Conservez-moi toujours l’estime et l’amitié ;
Et n’oubliez jamais, quand vous serez le maître,
370Que c’est moi qui vous force et qui vous aide à l’être[1].

OTHON, seul[2].

Que ne m’est-il permis d’éviter par ma mort
Les barbares rigueurs d’un si cruel effort !

FIN DU PREMIER ACTE.
  1. « Je remarque que Plautine conseille ici à Othon précisément la même chose qu’Atalide à Bajazet ; mais quelle différence de situation, de sentiments et de style ! » (Voltaire.) — Voyez Bajazet, acte II, scène v.
  2. Le mot seul manque dans les éditions de 1665 et 1666.