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ACTE SECOND.




La rivière du Phase et le paysage qu’elle traverse en font la décoration. On voit tomber de gros torrents des rochers qui lui servent de rivages, et l’éloignement qui borne la vue présente aux yeux divers coteaux dont cette campagne est enfermée.

Junon, sous le visage et l’habit de Chalciope, tire Jason à part sur les bords de ce fleuve, et après lui avoir appris ce qu’elle a déjà gagné sur l’esprit de Médée à la faveur de ce déguisement, elle lui raconte qu’Hypsipyle, impatiente de le revoir, s’étoit mise sur la mer pour le suivre, et qu’y ayant fait naufrage, Neptune l’avoit reçue dans son palais, et la lui alloit renvoyer pour traverser ses amours avec Médée, et empêcher que son retour en Thessalie, après la conquête de la Toison, ne devînt funeste pour Pélie, son fils. Elle l’exhorte à ne point perdre de temps et à faire tous ses efforts à regagner tout à fait Médée, et emporter la Toison avant l’arrivée de cette amante.

Médée entre, sous prétexte de chercher sa sœur ; et quelque ressentiment dont elle soit animée contre Jason, ce prince adroit agit si bien avec l’aide de Junon, qu’il l’adoucit ; mais comme elle est prête à se rendre, Absyrte son frère interrompt leurs discours, pour leur faire part du ravissement que lui a donné ce qu’il a vu s’avancer vers eux sur le Phase ; et en même temps on voit sortir de ce fleuve le dieu Glauque, avec deux tritons et deux sirènes, qui chantent ces paroles, cependant qu’une grande conque de nacre, semée de branches de coral et de pierres précieuses, portée par quatre dauphins, et sou-