Nérine,que dis-tu ? Serait-ce bien la reine ?
Le ciel ferait-il choix d’Antigone, ou d’Ismène ?
Voudrait-il Étéocle, ou Polynice, ou moi ?
Car tu me dis assez que ce n’est pas le roi ;
Et si le ciel demande une victime pure,
Appréhender pour lui, c’est lui faire une injure.
Serait-ce enfin Thésée ? Hélas ! Si c’était lui…
Mais nomme, et dis quel sang le ciel veut aujourd’hui.
L’ombre du grand Laïus, qui lui sert d’interprète,
De honte ou de dépit sur ce nom est muette ;
Je n’ose vous nommer ce qu’elle nous a tu ;
Mais, préparez, madame, une haute vertu :
Prêtez à ce récit une âme généreuse,
Et vous-même jugez si la chose est douteuse.
Ah ! Ce sera Thésée, ou la reine.
Écoutez,
Et tâchez d’y trouver quelques obscurités.
Tirésie a longtemps perdu ses sacrifices
Sans trouver ni les dieux ni les ombres propices ;
Et celle de Laïus évoqué par son nom
S’obstinait au silence aussi bien qu’Apollon.
Mais la reine en la place à peine est arrivée,
Qu’une épaisse vapeur s’est du temple élevée,
D’où cette ombre aussitôt sortant jusqu’en plein jour
A surpris tous les yeux du peuple et de la cour.
L’impérieux orgueil de son regard sévère
Sur son visage pâle avait peint la colère ;