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On y trouve en effet, aux pages 167 et suivantes, la Plainte de la France à Rome, par Monsieur Corneille. Élégie[1]. Mais ces impressions sans autorité ne peuvent prévaloir contre l’édition originale et officielle dont nous venons de parler. Cette pièce de vers a d’ailleurs toujours figuré dans les Œuvres complètes de Fléchier ; on la trouve à la page 151 de la première partie du tome V de l’édition publiée à Nîmes en 1782, et à la page 175 du tome IX de l’édition publiée à Paris en 1828. Ce n’est au contraire que depuis peu de temps qu’elle fait partie des éditions de Corneille. L’abbé Granet s’est gardé de l’admettre dans ses Œuvres diverses, et je la trouve pour la première fois, en 1817, dans l’édition des Œuvres complètes donnée par Ant.-Aug. Renouard. Si du reste on examine de près le style de ce morceau, on remarque que la facilité élégante avec laquelle il est écrit n’a aucun rapport avec la manière plus large, plus éloquente, mais moins dégagée et moins vive, et, pour tout dire en un mot, moins moderne, que nous observons chez notre poëte. — Nous reproduisons le texte qui a été attribué à Corneille par ses derniers éditeurs ; il diffère notablement de celui de l’impression originale (in-4o) et des éditions de Fléchier, et il a dix vers de moins à la fin.

Cette Plainte de la France a pour objet l’attentat des Corses de la garde d’Alexandre VII, qui, le 20 août 1662, tirèrent sur le carrosse du duc de Créqui, ambassadeur de France, dont ils tuèrent un page et blessèrent plusieurs domestiques. Le pape offrit à ce sujet toute espèce de réparation, et cette injure fut oubliée à la condition que des excuses seraient faites par le cardinal Chigi, neveu du saint-père, qui vint en effet les porter au Roi en 1664, et qu’une pyramide élevée à Rome constaterait la réparation accordée.


Lorsque sous le plus juste et le plus grand des princes
L’abondance et la paix régnent dans mes provinces,
Rome, par quel destin tes Romains irrités
Arrêtent-ils le cours de mes prospérités ?
Après avoir gagné victoire sur victoire, 5
Et porté ma valeur au comble de la gloire,
Après avoir contraint par mes illustres faits
Mes rivaux orgueilleux à recevoir la paix,
J’espérois d’établir une sainte alliance,
D’unir les intérêts de Rome et de la France, 10

  1. Bibliothèque impériale, Y 6121 A.