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Va s’animer pour toi de ce que j’eus d’audace, 10
Quand sur les bords du Rhin, pleins de sang et d’effroi,
Je fis suivre à mes vers notre invincible roi[1].
Ce cours impétueux de rapides conquêtes,
Qui jeta sous ses lois tant de murs et de têtes,
Sembloit nous envier dès lors le doux loisir 15
D’écrire les succès[2] qu’il lui plaisoit choisir :
Je m’en plaignis dès lors[3] ; et quoi que leur histoire
À qui les écriroit dût promettre de gloire,
Je pardonnai sans peine au déclin de mes ans,
Qui ne m’en laissoient plus la force ni le temps : 20
J’eus même quelque joie à voir leur impuissance
D’un devoir si pressant m’assurer la dispense ;
Et sans plus attenter aux miracles divers
Qui portent son grand nom au bout de l’univers,
J’espérai dignement terminer ma carrière, 25
Si j’en pouvois tracer quelque ébauche grossière
Qui servît d’un modèle à la postérité,
De valeur, de prudence et d’intrépidité.
Mais comme je tremblois de n’y pouvoir suffire,
Il se lassa de vaincre, et je cessai d’écrire[4] ; 30
Et ma plume, attachée à suivre ses hauts faits,
Ainsi que ce héros acheva par la paix[5].
La paix, ce grand chef-d’œuvre, où sa bonté suprême

    dans la deuxième partie du Mercure de mars 1680 (p. 272-287). Le catalogue des livres relatifs à l’histoire de France de la Bibliothèque impériale indique en outre (tome II, p. 254) la Conjouissance du Danube avec la Marne, anonyme, deux pièces latines de Lenglet, une de Fleury, et un épithalame latin du collège des Jésuites.

  1. Voyez ci-dessus, p. 252.
  2. Le succès, dans les Œuvres diverses.
  3. Voyez ci-dessus, p. 224, vers 9-12.
  4. Voyez ci-dessus, p. 225, vers 19 et 20, et note 2. Corneille semble faire allusion ici à un vers que, suivant toute apparence, il avait inspiré à Boileau.
  5. Voyez ci-dessus, p. 326 et suivantes.