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Cependant ils en pouvaient être déjà instruits, si je l’eusse voulu, et semblent n’être plus sur le théâtre que pour servir de témoins au mariage de ceux du second ordre ; ce qui fait languir toute cette fin, où ils n’ont point de part. Je n’ose attribuer le bonheur qu’eurent ces deux comédies à l’ignorance des préceptes, qui était assez générale en ce temps-là, d’autant que ces mêmes préceptes, bien ou mal observés, doivent faire leur effet, bon ou mauvais, sur ceux même qui, faute de les savoir, s’abandonnent au courant des sentiments naturels ; mais je ne puis que je n’avoue du moins que la vieille habitude qu’on avait alors à ne voir rien de mieux ordonné a été cause qu’on ne s’est pas indigné contre ces défauts, et que la nouveauté d’un genre de comédie très agréable, et qui jusque-là n’avait point paru sur la scène, a fait qu’on a voulu trouver belles toutes les parties d’un corps qui plaisait à la vue, bien qu’il n’eût pas toutes ses proportions dans leur justesse.

La comédie et la tragédie se ressemblent encore en ce que l’action qu’elles choisissent pour imiter doit avoir une juste grandeur, c’est-à-dire qu’elle ne doit être, ni si petite qu’elle échappe à la vue comme un atome, ni si vaste qu’elle confonde la mémoire de l’auditeur et égare son imagination. C’est ainsi qu’Aristote explique cette condition du poème, et ajoute que pour être d’une juste grandeur, elle doit avoir un commencement, un milieu, et une fin. Ces termes sont si généraux, qu’ils semblent