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tout entier, en vivant sous les yeux de son amie, il se rapproche d’elle, il lui marque sa tendresse comme dans une étreinte. Il en a le sentiment si vif qu’il le condense dans cette formule saisissante : « L’art d’écrire des lettres n’est que l’art d’allonger les bras. »

Il suit en pensée les lettres qu’il écrit à Sophie. Il imagine le moment où elle en reçoit tout un paquet, au château d’Isle. « D’abord, elle le pèsera de la main ; elle le serrera pour quand elle sera seule ; il lui tardera bien d’être seule… On rangera les feuilles ; on lira presque toute la nuit ; il en restera la moitié encore pour le lendemain. Le lendemain, on achèvera, et l’on relira pour soi et pour sa chère sœur, les lignes qui auront plu davantage… Ce volume d’écriture qu’on aura reçu et lu avec tant de plaisir, que contiendra-t-il ? Des riens ; mais ces riens mis bout à bout forment de toutes les histoires la plus importante, celle de l’ami de notre cœur. »

Il se représente d’autant mieux Sophie au château d’Isle qu’il le connaît. Il s’y est arrêté l’année