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aiment voir les hommes se rouler à leurs pieds, mais qui les y laissent.

Mme de Salignac, la plus âgée des trois sœurs, était aussi la plus unie, la plus posée. Elle ne prendra que plus tard, vers 1767, la place de confidente près de Sophie. Le mariage ne lui réussit guère mieux qu’à Legendre. M. de Salignac disparut dans une banqueroute retentissante. Il lui laissait un fils qui dut chercher fortune à la Guyane, et une fille aveugle. À la fin de sa vie, Diderot, dans un appendice à sa Lettre sur les Aveugles, a cité des traits touchants de cette fine et délicieuse enfant, qui mourut à vingt-deux ans.

Quant à Sophie elle-même, elle séduisait d’abord par le contraste entre les qualités presque viriles de son esprit et ses grâces délicates, toutes féminines. Diderot souligne ce contraste d’un trait : « Ma Sophie est homme et femme quand il lui plaît. » D’une part, elle était douce, tendre, très « sensible » comme on disait alors, d’une santé fragile, parfois alarmante. D’autre part, elle avait le jugement le plus solide et le plus sensé, l’intelligence la plus lucide, une culture étendue et profonde, de la ré-