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braver la fureur de ces animaux dont la faim n’a servi qu’à exalter l’énergie. Bientôt la superstition, succédant à la colère, s’empare des révoltés. Ils regardent comme un juste châtiment du ciel la mort que mes deux chiens ont donnée au nègre qui, pour me tuer, n’a pas craint de dédaigner le signe protecteur que Fraïda a opposé à sa rage. Le cadavre qu’abandonnent mes dogues, est enlevé par les noirs, qui achèvent de le mettre en lambeaux pour le manger…

Ce festin d’anthropophages se fait sous mes yeux : les cris d’allégresse de ces horribles convives bourdonnent à mes oreilles affaiblies ; car j’avais eu le fatal avantage de conserver toute ma raison malgré les douleurs excessives qui m’enchaînaient inanimé, depuis tant