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son tour, il est devenu la proie ; car ils ont soin de dire comme une maxime empruntée à la loi du talion : puisqu’il nous mange, mangeons-le.

Un de ces terribles animaux nous dévora un gabier à bord de la Gazelle. Ce malheureux, en montant dans les haubans pour passer une manœuvre, tombe à la mer : il nageait pour saisir le bout de corde qu’on lui avait jeté ; le navire ne filait qu’un nœud tout au plus. Au moment où il touchait le bout de filain, il jette un cri, lutte contre les îlots au-dessus desquels sa figure se contorsionne encore. Du sang paraît à la surface de la mer, et nous ne voyons plus notre infortuné camarade. Un gros requin, qui se tenait depuis quelques jours sous les ferrures de notre gouvernail, venait