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des églises du désert.

aucune interruption dans les assemblées religieuses. Il y a même quelque chose de mieux à dire. Deux années plus tard, tout à fait dans le bas Languedoc, et peut-être non loin de cette esplanade de Montpellier où périt le ministre, un synode national se réunit, plus garni de pasteurs et d’anciens laïcs que nul autre encore dans toute la durée du siècle.

On remarque que dans l’exécution de ce jeune ministre, les édits de Louis XIV et la déclaration de 1724 avaient été appliqués avec une extrême rigueur[1]. Le pasteur n’avait pas été saisi dans l’exercice même de ses fonctions, circonstance qui eût pu seule le constituer en flagrant délit. Il avait été pris la nuit chez un fidèle. Si ce n’eût été sa propre déclaration et les notes synodales, rien ne prouvait qu’il eût convoqué des assemblées, ni qu’il eût exercé les fonctions de ministre. Mais, en sacrifiant cette nouvelle victime, on voulut faire un exemple ; il réussit comme tous les autres. Ce fut M. de La Deveze, lieutenant commandant la province en l’absence du

  1. La juridiction des intendants fut celle qui fut surtout fatale aux églises. Ce fut une des institutions les plus influentes du génie despotique de Louis XIV, et il n’est pas très-facile, du milieu de nos idées actuelles sur la justice, de s’en former une idée nette. L’intendant de province, outre sa qualité administrative, était une sorte de commissaire permanent pour l’exercice de la justice ; il jugeait en dernier ressort, sans appel, au grand criminel, comme en affaire de simple police. En juridiction ordinaire, l’intendant, selon les ordonnances, ne pouvait juger en dernier ressort qu’assisté d’officiers ès-lois, gradués, au nombre de sept au moins. Mais par les ordonnances du roi des 1er et 16 février 1745, il fut dérogé à la juridiction ordinaire en matière de crimes d’assemblées ; et le pouvoir fut donné aux intendants de juger « sans autre forme ni figure de procès ; » alors ce seul magistrat prononçait en dernier ressort. En juridiction ordinaire, les intendants, assistés des sept gradués assesseurs, et signant les jugements avec eux, avaient toute cour, juridiction et connaissance ; par ordonnance d’attache, commettaient parmi les sept gradués, un procureur du roi, un juge instructeur, et un greffier. La cour d’intendance