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on eût répondu par la force à tout ce que la force avait de plus odieux. Au surplus, la correspondance que nous avons citée, entre le haut Languedoc et l’intendant Lenain, prouve que les gouverneurs de province étaient mieux instruits que les évêques, et qu’ils n’avaient pas une très-grande défiance sur les dispositions des églises.

Toutefois les violents réquisitoires du parlement de Toulouse et les soupçons des ecclésiastiques ne tardèrent pas à porter des fruits amers. L’année qui suivit la prise du pasteur Roger fut suivie d’une année qui vit une semblable catastrophe. Le Languedoc releva le gibet du Dauphiné. Les ordres de la cour et les défiances politiques où l’on était alors à cause de la guerre, faisaient redoubler de vigilance pour saisir les ministres, que l’on soupçonnait d’être les premières causes de l’obstination héroïque des réformés. Ce fut encore, chez le gouvernement de ce temps, une faute constante, qu’on a de la peine à s’expliquer. Les ministres qu’il poursuivait si vivement ne cessèrent d’être les plus puissants garants de l’ordre. Eux seuls, par leurs conseils, par leurs lumières, par leur évangélique prudence, préservaient 1746.les paysans cévenols et des plaines du Languedoc de tomber dans le fanatisme et dans les excès horribles qu’il entraîne. Eux seuls préservaient la contrée d’une répétition de la guerre camisarde, qui fut commencée par la cruauté des administrateurs catholiques, mais qui devint une arène où catholiques et réformés se rendirent coupables à l’envi des plus affreux massacres. Dans d’autres circonstances, et sous un gouvernement plus doux, les pasteurs toutefois pouvaient seuls répondre de la tranquillité publique, et le prouvèrent en effet. C’est ce dont les