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histoire.

modestie dans une cruelle souffrance. » Voici le précis très-attachant que le ministre Antoine Court nous a laissé sur son but et sur ses travaux ; on nous saura bon gré de le laisser parler lui-même.

« Ce fut en 1715 qu’il plut à Dieu de m’appeler au service de cette église (Nîmes). Et qui pourra dépeindre l’état où se trouvait à cette époque et cette église et la religion en France. À peine en connaissait-on quelque trace. La persécution d’un côté, l’ignorance et le fanatisme de l’autre, l’avaient entièrement ou anéantie ou défigurée. Le plus grand nombre de ceux qui conservaient dans leur cœur le plus d’attachement pour elle, démentaient et déshonoraient cet attachement par leur conduite extérieure. Ils tenaient, pour ainsi dire, d’une main l’Évangile et de l’autre l’idole. Pendant la nuit ils rendaient à Dieu, dans leurs maisons, un culte secret, et pendant le jour ils allaient publiquement à la messe. Quels soins ne fallut-il pas pour les retirer d’une conduite aussi déshonorante et si contraire aux maximes de l’Évangile ? Combien n’en fallut-il pas pour retirer la reli-

    enfin, à l’exception des sacrements qu’il n’eut jamais charge d’administrer, il n’est rien qu’il ne fit pour les églises sous la croix. Un seul trait gâta tous ces généreux efforts. Il paraît que Duplan, qui avait vu toutes les scènes des Cévennes, ne put renoncer entièrement aux habitudes de fanatisme, dont il avait été le témoin. À Londres, il fréquentait les prétendus prophètes et les inspirés. Il indisposa ainsi le cabinet anglais contre lui et indirectement contre les églises. Le ministère britannique alla même jusqu’à menacer de retirer toute protection et tout secours. Ces excès, si éloignés de la sagesse d’esprit du ministre Court, qui avait été lui-même nommé député des églises en 1744, furent avec raison condamnés par ce dernier ; Duplan se plaignit qu’on voulait le noircir pour le supplanter. Il en résulta une vive controverse et des jugements devant des arbitres, auxquels le ministre Court adressa ce Mémoire, dans lequel il se justifie. Nous ne faisons mention de ces débats si peu intéressants pour l’histoire générale que parce qu’ils fournirent l’occasion au ministre Court de tracer ce précis de la renaissance du culte.