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des églises du désert.

Quant à leur caractère littéraire, il ne nous semble pas d’une très-grande originalité. Nous sommes absolument incompétents pour juger quelle analogie lointaine, elles peuvent présenter avec les poésies de Goudouli, ce Pétrarque languedocien, qui sut mêler à la couronne poétique de Livia ses chants pleins de tristesse sur la mort de Henri iv. Depuis longtemps il y avait des Académies littéraires à Arles, à Nîmes, à Montpellier, à Béziers, et à Marseille ; l’églantine des jeux floraux prolongeait avec grâce les traditions de la muse provençale. Mais toutes ces institutions officielles eurent sans doute fort peu de prise sur les poésies populaires du bas Languedoc. C’était uniquement les malheurs des églises que les auteurs de complaintes voulurent célébrer. Ils ne songeaient guère à soumettre aux académies les éloges poétiquement populaires de ces pasteurs que les lois punissaient de mort. Il ne serait pas impossible que ces ballades eussent été traduites du dialecte languedocien en vers français ; nous manquons de lumières pour décider ce point. La littérature contemporaine était languissante. Son dernier produit vigoureux avait été ces étranges stances où Lagrange Chancel stigmatisait le régent et ses roués, en vers cyniques, mais pleins d’énergie. Ces ballades n’offrent rien de semblable. Elles n’ont aucun caractère poétique proprement dit, comme les ballades allemandes, si riches d’images naturelles ; elles ont au contraire une analogie frappante avec certains de ces chants écossais que Walter Scott nous a fait connaître ; ce sont des légendes descriptives et historiques, où le peuple des frontières d’Écosse comme le paysan du Vivarais, célèbre quelque aventure tragique de ses mœurs chevaleresques ou religieuses. Ce n’est pas toutefois que ces complaintes