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le certificat du baptême accordé par le ministre du culte proscrit. Ce certificat seul entraînait légalement la bâtardise de l’enfant. Ces moyens odieux furent contraires aux conclusions de l’avocat général, Le Baillif Ménager ; heureusement pour le succès d’une question d’état aussi évidente et aussi sacrée, ils furent également repoussés par le parlement de Rouen. Jean Levillain, qui osait poursuivre l’annulation du mariage de son frère et la bâtardise de son neveu, fut déclaré non recevable, et fut condamné aux dépens. Seulement il fut enjoint au ministère public des lieux de veiller à l’éducation de l’enfant et d’en certifier la cour de trois mois en trois mois. On sait, en effet, que, d’après les édits, l’enfant devait nécessairement fréquenter les écoles catholiques. On voit, par ce premier exemple, à quel genre de contestations l’état civil des protestants du royaume était exposé. Un collatéral cupide, violant à la fois les règles de l’une et l’autre religion, pouvait attaquer en justice la validité d’un mariage auquel il avait lui-même souscrit ; il lui était loisible de révoquer en doute la légitimité d’un enfant dont il espérait prendre l’héritage. Cette conduite si ouvertement vile et captieuse, était cependant la conséquence exacte des édits de Louis XIV, résumés par la déclaration de 1724. Il fallut que les magistrats catholiques fussent plus humains et plus sensés que les lois, ou plutôt il fallut qu’ils violassent ouvertement les lois de l’État, afin de pouvoir appliquer les lois de la justice supérieures à toutes les autres. Avec le laps du temps, tous les Parlements du royaume adoptèrent la jurisprudence éclairée de la cour de Rouen.

À peu près à la même époque où les hautes cours de justice reculaient devant l’application rigoureuse