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état civil. Les conclusions posées étaient qu’il plût au parlement de faire défense à Marie Talbot de se dire femme et veuve de Jacques Levillain ; déclarer l’enfant sorti des œuvres de ladite Talbot illégitime et comme tel déchu de tous droits successifs dans la succession de Jacques Levillain. Ces étranges prétentions ne furent pas accueillies. Elles ne prenaient même point la peine de déguiser leur inhumanité et l’avidité barbare du demandeur. On sera peut-être curieux de savoir les motifs que l’on plaidait devant le parlement de Rouen, vers le milieu du xviiie siècle, pour soutenir des conclusions de ce genre.

L’avocat du demandeur en illégitimité du mariage et du fruit ne jugeait pas à propos de parler ouvertement de l’état des protestants ; il soutenait que les lois ne pouvaient reconnaître les mariages sans qu’ils fussent conformes à ce qu’elles prescrivent ; que dès lors Marie Talbot ne pouvait jamais se dire femme de Levillain, ni son fils légitime et habile à succéder ; que d’ailleurs la prétendue célébration du mariage dont elle avait voulu se servir était de son consentement rejetée du procès sur l’inscription de faux formée contre l’acte[1] ; que son prétendu état n’était qu’imaginaire et n’avait jamais eu de réalité ; qu’enfin il demeurait constant, d’après l’extrait de baptistère de l’enfant, qu’il avait été baptisé comme n’étant point légitime.

Ce dernier trait des conclusions de la partie adverse de la femme mariée et de l’orphelin portait sur

  1. Le retrait de cette pièce du dossier montre qu’elle consistait en un certificat du ministre protestant, et l’avocat de la défenderesse y consentait. Ce ne fut que bien plus tard que l’on vit les cours sanctionner la production en justice d’un acte civil et religieux, signé d’un pasteur ; les magistrats du premier tiers du xviiie siècle n’étaient pas encore arrivés à ce point d’équité.