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des résultats de colère, qui ne servaient qu’à redoubler le zèle des opposants et à faire mieux ressortir l’impuissance de la législation. D’ailleurs cette mesure, dès que le cardinal de Fleury devint maître des affaires, ne fut plus dans sa pensée qu’un épouvantail toujours suspendu sur les religionnaires, et dans lequel il comptait trouver des moyens de répression sévère, si des mouvements sérieux eussent éclaté. C’est le seul moyen de concevoir la longue durée d’une intolérance écrite, si minutieuse, telle que tout homme d’état, doué de sens, dut en découvrir sur-le-champ l’impossibilité pratique. Ce fut donc plutôt une mesure de réserve que d’action. Aussi nous verrons les assemblées être chaque jour plus fréquentes et plus nombreuses même sous l’empire de cette loi. Nous verrons de vrais prêtres supplier le gouvernement de fermer cette source féconde de sacrilèges ; nous verrons le subdélégué du Languedoc Daudé, quatre ans après sa promulgation, être témoin en quelque sorte des réunions protestantes et ne pas les troubler. Nous verrons même l’intendant comte de Saint-Maurice résister assez fortement au clergé, qui demandait quelquefois l’exécution intégrale de la déclaration ; nous verrons l’administrateur opposer aux curés et à leur évêque cette raison péremptoire, que les prisons de la province ne suffiraient pas pour renfermer le troupeau rebelle.

Toutefois on peut juger des effets désastreux que dut produire une telle arme toujours prête à frapper, dont l’usage était réglé par une foule de chances capricieuses et passagères, telles que l’esprit plus ou moins dévot de la cour, le zèle des intendants, la sévérité des parlements et l’activité des procureurs du roi. Cette minutieuse tyrannie offrait une large prise à l’injustice de détail. Si le progrès des lumières aidé