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qui résuma toutes les lois précédentes en un code incohérent. Ses dispositions cruelles devaient être corrigées par les ordres précis transmis aux intendants. Elles devaient être prodigieusement adoucies dans l’exécution. L’idée fondamentale se résume évidemment en cet axiome janséniste : à savoir, que les prêtres devaient, sous l’autorité des magistrats, accorder les sacrements sans examen aux nouveaux convertis, précisément de même qu’aux appelants de la constitution Unigenitus au futur concile. D’ailleurs, le conseiller d’Aguesseau, que Rulhière appelle « le plus grand adversaire des héritiers calvinistes, » le père du chancelier, avait été chargé par Louis XIV de la direction de la régie spoliatrice des biens des religionnaires ; il ne quitta ces fonctions que lorsqu’un arrêt du Conseil du régent (10 août 1716) les transféra au conseil de conscience, et ce fut ensuite Lavergne de Tressan, archevêque de Rouen, et auteur de l’édit de 1724 » qui dirigea les affaires de cette intolérance fiscale. Nous verrons plus tard le vieux procureur-général Joly de Fleury jetant ses regards en arrière sur cet ouvrage artificieux. On jugera, par ses aveux mêmes, qu’il se trompa doublement, lorsqu’il pensa d’abord que des curés molinistes se contenteraient de l’adhésion extérieure de disciples suspects, et lorsqu’il crut ensuite que la foi indomptable des nouveaux convertis pourrait revêtir sans peine un masque aussi lâche. Aussi l’on verra que les prêtres reculèrent devant le sacrilège, comme les réformés devant la dissimulation. L’édit de 1724 fut cassé dans la suite par la bonne foi des persécuteurs et par l’héroïsme des persécutés. Tandis que la cour du duc de Bourbon, excitée par la soif d’honneurs qui dévorait quelques prélats, voyait ses mesures cruelles