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temps après cette époque, se démit de ses fonctions ; la retraite de ce sage magistrat, bien différente de celle du cruel Baville, fut honorée par une foule de mémoires législatifs, où il déposait le fruit de sa longue expérience et de ses habitudes formalistes. Malesherbes publia sous Louis XVI une consultation lumineuse de Joly de Fleury sur la situation des protestants en 1752. Si d’un côté on y voit la trace profonde des habitudes d’un esprit parlementaire aveuglément imbu de la routine des anciennes lois ; de l’autre, on y découvre nettement le véritable esprit selon lequel l’édit de 1724 fut disposé, édit sur lequel Joly de Fleury lui-même ne fut pas sans influence.

On y voit clairement que dans les idées de la haute magistrature d’alors, la renaissance religieuse des églises du Languedoc, qui avait signalé la venue du régent, n’était qu’un trop confiant espoir qu’il fallait refouler. On voulut y remédier par une nouvelle loi qui devait renfermer la substance de tant d’édits tombés en désuétude ; on voulut en faire un corps, et les coordonner entre eux. « M. le chancelier d’Aguesseau y travailla. Son séjour à Fresnes suspendit l’ouvrage. On reprit le système d’une nouvelle loi après la mort du duc d’Orléans, » disait le vieux Joly de Fleury au Conseil du roi Louis XV. Il est impossible de méconnaître par l’exposé des idées du procureur-général, que la déclaration de 1724 avait un double objet ; d’abord le projet appuyé par l’évêque de Tressan et par l’esprit moliniste ultramontain, de poser en fait qu’il n’y avait plus que des catholiques en France, et de poursuivre à toute outrance les dissidents avoués ; ensuite le projet que soutenait toute la magistrature jansénienne, de tirer parti de cette fiction pour empêcher le clergé d’être le juge du fait de la conversion sérieuse ou sti-