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des églises du désert.

pour l’initier, par l’eau du baptême, aux rits d’une église, où peut-être de cruelles épreuves l’attendaient ; c’était là que se réhabilitaient, après une confession de repentir, ces mariages catholiques que le fanatisme des prêtres imposait aux époux, tandis que d’autres familles demandaient à leur foi le noble et triste courage de ravir les restes de leurs proches aux insultes du fanatisme, en les déposant, au milieu des ténèbres, dans les caves de leurs propres maisons. Les ministres étaient rares et, en général, peu lettrés ; mais leur parole grave et fervente venait suppléer au poli de la forme, dont les paysans des Cévennes ignoraient le raffinement. Leurs livres religieux avaient été saisis ou détruits ; mais tous savaient les psaumes par cœur ; la lecture assidue de la Bible en avait gravé les passages et les traits dans leur mémoire. Il faut ajouter, à tous ces avantages, le souvenir et la présence des martyrs, et surtout l’exaltation profonde que le fanatisme des camisards avait allumée dans les âmes. Leurs exploits incroyables, leurs vengeances contre le clergé, leur capitulation glorieuse avec l’armée du grand roi, toutes ces choses entretenaient au loin, dans les lieux témoins de leur valeur, un courage qui semblait s’appuyer sur une confiance surnaturelle. Aussi le pasteur Court, et les premiers compagnons de ses courses, sentirent avant tout l’extrême importance de ramener les esprits à une foi moins désordonnée. Aussi, par leurs soins, et grâce à leurs sages conseils, l’entraînement d’une foi exagérée disparut. Elle fut circonscrite par la surveillance d’une vigilante discipline, et il ne resta qu’un courage plus froid et plus réglé. Ce fait laisse concevoir comment des assemblées régulières s’organisèrent avec tant d’ordre et tant de rapidité.