Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t3, 1888.djvu/32

Cette page n’a pas encore été corrigée

A navré cette femme et fait cet orphelin.
 
Le ciel peut être pur, la mer peut être belle,
La veuve du marin est sombre et se rappelle
L’effroyable tempête où son homme a péri
 
— C’est aussi de sa faute, à mon pauvre mari,
Dit-elle en soupirant à son fils qui l’écoute,
Il faut porter secours aux malheureux, sans doute,
Et nul ne l’a plus fait que mon pauvre Mathieu.
Mais affronter ainsi la mort, c’est tenter Dieu !…
On n’avait jamais vu de pareille marée.
Ton père était chez nous ; sa barque était rentrée ;
Il disait, en mangeant sa soupe ; Il faut qu’on soit
Maudit pour être en mer par ce vent de noroit !
Après dîner, Mathieu prend sa pipe et l’allume
Et va fumer dehors, comme il avait coutume.
Là, malgré le gros temps, ils étaient quelques-uns
Qui regardaient sauter et mousser les embruns,
Quand tout à coup, voilà que mon homme remarque,
Du côté des rochers Saint-Pierre, un trois-mâts barque…
Doux Jésus ! Ce ne fut pas long. En un clin d’œil
Le malheureux navire échoua sur l’écueil.
— Un canot ! dit Mathieu… J’étais épouvantée ;
Les autres lui montraient cette mer démontée