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promesses, à mesure que je lisais dans les yeux suppliants de Grace qu’elle semblait exiger encore davantage.

Cette dernière promesse parut pourtant la satisfaire pleinement. Elle me baisa la main, et j’y sentis tomber une larme brûlante.

— Maintenant, mon bon frère, nommez votre condition, dit-elle après un peu de temps pris pour se remettre ; quelle qu’elle soit, je l’accepte volontiers.

— C’est de me laisser prendre la direction complète de votre santé, de me permettre d’appeler un médecin, et de faire venir ici qui bon me semblera.

— Non pas lui du moins, Miles, non pas lui ! vous n’y pouvez songer.

— Non, ma sœur ; sa présence me chasserait de la maison. À cela près, vous consentez ?

Grace fit un signe d’assentiment et retomba sur ma poitrine. Ses forces étaient épuisées. Je soutins encore longtemps la frêle enfant, sans lui parler, et même la forçant au silence. Ce second repos lui fit du bien, et elle finit par me dire qu’elle se sentait en état de regagner sa chambre, et qu’elle désirait se jeter sur son lit jusqu’à l’heure du dîner. J’appelai Chloé, et nous conduisîmes ensemble la chère malade. En traversant les longs corridors, ma sœur appuyée sur mon bras, la tête penchée sur mon épaule, faisait effort pour lever sur moi un regard reconnaissant, et plus d’une fois je sentis la douce pression de sa main, par laquelle elle semblait vouloir m’exprimer toute l’étendue de son affection.

Il me fallut longtemps pour me remettre, après cette entrevue. Je m’enfermai dans ma chambre, pleurant comme un enfant sur la sœur que j’avais laissée si fraîche et si belle, quoique même alors le doute eût commencé à ronger son cœur. J’avais encore des explications à recevoir ; mais je résolus de m’armer de sang-froid pour les écouter de manière à ne pas augmenter encore l’angoisse que Grace devrait éprouver à me les donner. Dès que je fus assez calme, je me mis à écrire des lettres. L’une était pour Marbre. Je lui disais de laisser le second lieutenant veiller au déchargement du bâtiment, et de venir me rejoindre par le retour du sloop. J’avais besoin de lui parler ; car je prévoyais que je ne pourrais point faire le prochain voyage, et mon intention était de lui confier les fonctions de capitaine. Nous avions à nous concerter ensemble à ce sujet. Je ne lui cachai pas le motif de cette détermination, mais sans lui faire connaître la cause de la maladie de ma sœur. J’envoyai à Marbre les noms de plusieurs médecins, en lui recommandant de m’amener le pre-