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examiner et rejeter les débris les uns après les autres ; il nous entendait causer, bien que dans une langue qui lui était étrangère, sans cesser de témoigner la plus complète impassibilité. Il finit cependant par apporter au capitaine une bûche à demi brûlée, et la lui mit devant les yeux, comme s’il commençait à prendre quelque intérêt à nos recherches. Il se trouva que c’était un morceau de bois ordinaire, qui avait appartenu à un des hêtres de la forêt, et qui faisait partie des restes d’un bûcher. Son action nous fit plaisir, mais le drôle ne comprit pas le motif de l’intérêt que nous lui témoignions. Il ne savait évidemment rien de ce qui concernait le bâtiment étranger.

En parcourant les alentours de ce campement abandonné, nous trouvâmes les traces d’un sentier qui conduisait au rivage ; elles étaient trop évidentes pour qu’on pût s’y méprendre, et elles aboutissaient à la mer du côté opposé à celui par lequel le Plongeur avait fait entrer la Crisis, et sur un point qu’on ne pouvait découvrir du lieu où nous étions à l’ancre. Nous y trouvâmes dans une espèce de plage de débarquement plusieurs des débris plus considérables du bâtiment naufragé, ceux qu’on n’avait pas jugé nécessaire de porter au feu parce qu’il ne s’y trouvait pas de métal. Parmi des objets de cette nature se trouvaient une portion de la quille, qui avait presque trente pieds de longueur, les chevilles de la carlingue, la carlingue, avec les varangues, le tout tenant encore ensemble. Ce fut là seulement que nous trouvâmes un peu de métal, et uniquement parce que le fragment était trop lourd et trop considérable pour pouvoir être transporté. Nous regardâmes avec soin dans tous les sens, espérant découvrir quelque indice du désastre dont ce lieu avait été le théâtre ; ce fut sans succès pendant quelque temps. Mais à la fin, en rôdant à quelque distance de la côte, je m’assis sur une pierre plate qu’on avait placée sur la roche vive qui couvrait la plus grande partie de l’île, évidemment afin de servir de siège. Me trouvant mal assis, je déplaçai la pierre pour la mettre d’aplomb, et je découvris qu’elle posait sur une ardoise provenant de la table de loch. Cette ardoise était couverte de caractères encore très-lisibles, et bientôt tous mes compagnons furent autour de moi, impatients de savoir ce qui y était écrit. La triste inscription était conçue en ces termes :

« Le brig américain la Loutre de Mer, capitaine John Squires, attiré par artifice dans cette baie, le 9 juin 1797, et surpris par les sauvages dans la matinée du 11. Le capitaine, le second lieutenant et sept hommes de l’équipage tués sur la place. Le brig pillé d’abord, puis